29 janvier 2007


American Dream Hostel, 24eme rue et Lexington.

Lou, notre hôte :

- New York est une ville pour vous. Vous êtes étrangers et vous êtes à Manhattan, donc vous êtes riches. Mais vous êtes pauvres aussi, sinon vous ne seriez pas ici, vous iriez dans un vrai hôtel. Vous êtes les jeunes de la classe moyenne, des gens qui sont prêts à s’ouvrir à New York et à l’aimer.

J’avais votre âge quand je suis arrivé ici, avec ma petite fille de 8 ans. C’était il y a 25 ans. Elle n’a jamais voulu repartir. J’ai ouvert cette auberge il y a 7 ans et depuis, j’ai pu rencontrer des milliers de personnes. On vient dans une auberge, on vient chez Lou. Ici, ça va vite. On peut rester un mois ou une nuit. Ils viennent de partout, ils cherchent la même chose : New York. Une fois seulement, un homme est venu pour de mauvaises raisons. Il n’aimait pas les gens. Je lui ai demandé pourquoi il était en ville, il m’a simplement répondu qu’il partait le lendemain. Il n’était pas fait pour être ici.

New York prend tout : les enfants, les immigrés, les mendiants et les millionnaires. Et elle leur offre à tous la même chance, elle leur donne tout son cœur. Il faut la traverser, marcher dans ses rues, dans ses parcs et dans ses musées. Le monde entier s’y croise, toutes les œuvres, tous les artistes, tous les pays. Elle ne laisse pas beaucoup de repos, ni de répit, c’est vrai…mais elle se donne toute entière à ceux qui la veulent vraiment.

19 janvier 2007


Heure locale - 03 :07 pm

En quelques jours j’ai rencontré un prêtre, un metteur en scène, un aventurier, un joueur de hockey, un homosexuel, un dealer, une biologiste, une fille perdue, un mécène. Tous m’évoquent la France avec un regard lointain et songeur. C’est peut-être cela notre point commun.

Je ressens de nombreuses contradictions, chez les gens, dans leurs mœurs et leurs attitudes. Les corps deviennent lascifs et profondément sexuels la nuit dans les clubs. La jeunesse est ivre, elle titube et balbutie, elle, qui appartient à l’élite intellectuelle de ce pays. Elle se jette sur tous les corps qu’elle croise. Et pourtant, la vue de l’Extase de Sainte-Thérèse, d’un grand érotisme, la laisse sans voix.

L’Aventurier parle peu. Il me fait penser à une autre époque, silencieux et libre. Nous ne sommes pas dans la ville quand il me regarde. Ses yeux bleus font disparaître le décor des bâtiments et des taxis qui filent dans la nuit, ses cheveux blonds ne sont pas dociles, il fume sa cigarette tranquillement. Nous faisons quelques pas ensemble, je sais qu’il observe les autres qui s’agitent. Tandis que tout se bouscule et se confond autour de nous, je pense enfin trouver une unité ici.

10 janvier 2007


Heure locale - 09 : 27

Les images se bousculent en arrivant. La lumière me frappe, l’océan borde la ville, tout semble se rencontrer. Les habitations s’étendent à perte de vue depuis mon hublot, quand surgit soudain le cœur de Boston, cette masse qui s’élève et qui s’impose. Je pense à l’excès américain, mais non, car cela n’est pas tout. Plus tard, je pense aux débuts de ce nouveau continent, avec de petits immeubles en briques et des résidences victoriennes, les arbres, les chemins pleins de détours, mais cela ne suffit pas non plus.

Quand vient enfin la nuit, elle me révèle une splendeur, mille éclats et ombres qui s’agitent dans le froid. C’est étrange, le gigantisme semble étouffer quelque chose, dans la ville il n’y a pas de bruit. Tout pousse au crime, néons, pancartes, affiches, sirènes, mais le calme règne. Je ne comprends pas. Les piétons se faufilent par groupes, ils sortent d’un bar. Ils prennent un taxi, vite, il fait vraiment froid. Je me demande alors si je ne suis pas dans un être fantôme, creusé de l’intérieur. Je cherche son pouls.