Les badauds se promènent, l’après-midi s’étire paresseusement. Les couvertures étendues sur l’herbe, on déjeune, on rit, on s’endort paisiblement. Les promenades sont joyeuses, les pas assez lents, on discute avec ceux que l’on croise, on rit encore, les enfants dévalent les collines en courant. Les corps se fondent dans l’air doux, les regards éblouis par la clarté du soleil et des reflets sur l’étang. Le ciel est blanc de lumière, les branches des saules s’inclinent et dansent, doucement balancées par le vent. Deux musiciens jouent sur le pont.
La fille commence un air au violon, avec la beauté mélancolique d’un premier jour de printemps. Le garçon l’accompagne à la guitare, les spectateurs sont heureux. La mélodie s’atténue puis repart, comme un murmure délicat qui remplit l’air ensoleillé de cette journée pleine de fraîcheur. Il joue mais il n’ose pas la regarder vraiment, il cache son visage, tandis que la foule les écoute et s’anime, ravie par cette douce musique du temps des premières fleurs. Il la cherche puis se détourne, les badauds, eux, applaudissent ce joli couple qui joue si bien et qui les enchante tant.
Les branches frémissent et me donnent un léger frisson, le sourire des passants, les plaintes du violon, ses yeux qui la chérissent si tendrement et les statues de bronze sur le pont, donnent à son regard la beauté fragile des premiers jours des amants.